La guerre idéologique

Publié le par jacques thomassaint

            La guerre des classes (et plus seulement la lutte des classes) est soutenue par une guerre idéologique de tous les instants. Et il est à craindre que la gauche, extrême ou modérée, n’ait déjà perdu cette guerre. Car celle-ci est menée tambour battant par la quasi-totalité des grands médias télévisés et la plupart des journaux imprimés. Et surtout, par la diffusion massive, numériquement et financièrement, des films hollywoodiens.

            Ainsi, des millions de spectateurs iront voir le dernier film à la mode (« avatar » par exemple, ou « invictus » qui sort ces jours-ci)

            Or, il n’est pire diffuseur de l’idéologie dominante au pouvoir que ces films ! Sans que, la plupart du  temps, quiconque s’en rende compte ! C’est même fait pour ça !

            « Invictus », pour prendre un point d’appui, en est l’exemple flagrant. Sous l’allure positive d’une histoire de réconciliation entre noirs et blancs après l’apartheid en Afrique du Sud, on nous fait croire qu’un match de rugby en serait le déclencheur et le symbole.

            Or, s’il est vrai que Mandela, lors de ce match, a revêtu la tenue des springboks, et qu’il s’agissait d’un geste symbolique fort à l’égard des blancs, ce geste n’a en aucun cas été perçu ainsi par la population noire. Pour plusieurs raisons :

            - le rugby était et reste dans ce pays le sport des blancs, et marque la violence et l’oppression (ce qu’il ne fait pas en occident) ; le sport des noirs est le football…

            - les tribunes du stade étaient occupées par des blancs, des blancs et encore des blancs ! Les noirs étaient restés dans les bidonvilles ! Et avaient d’autres chats à fouetter !

            De plus, faire d’un match un élément moteur de l’histoire d’un pays, c’est occulter toute  l’histoire de l’Afrique du Sud, ses traditions, ses luttes, ses partis (dont l’ANC de Mandela), ses cultures diverses, de tribus, de peuples et de langues. C’est, à une échelle beaucoup plus petite, comme si un match de foot entre les patrons du CAC40  et les ouvriers licencies de chaffoteaux  effaçait les revendications de ces derniers !

            C’est aussi dire comme Sarkozy que l’homme africain n’est pas entré dans l’histoire, ce qui est une contrevérité et une ânerie (pour rester poli).

            C’est vouloir nous faire avaler qu’il suffirait d’un match (de rugby ou autre) pour réconcilier des ennemis et effacer d’un coup de sifflet des décennies de tueries, de tortures, d’emprisonnement, d’exploitation, de misère organisée… allons donc !

            D’ailleurs, rien n’est réglé, en Afrique du Sud. Misère et violence augmentent chaque jour. La succession de Mandela n’a pas été à la hauteur de cet homme magnifique.

            Retour sur « Invictus ». J’ai beau aimer l’acteur Clint Eastwood, je n’en oublie par pour autant que, politiquement, c’’est un homme de droite ! Et qu’il convient, quand même, de lire ce film en y pensant. Rien n’est innocent.

            Je n’ai pas vu l’autre film à millions de dollars. « Avatar ». Je ne sais si je gaspillerai mes précieux deniers pour cet autre objet idéologique, simpliste si j’en crois les résumés lus ici ou là. La technologie en trois dimensions ne me suffit pas. Serions-nous en présence d’un réel avatar de l’idéologie dominante, qui désormais recycle l’écologie à tour de bras ? J’en ai bien peur.

             Et ce ne sont pas les séries américaines rachetées par nos chaines de télé (le mot « chaines » est intéressant, non ?) qui démentiront mon propos. Elles ont cet avantage, du point de vue des  idéologues de droite, de ne pas y aller « en force », comme le discours d’un Besson, d’une Le Pen ou d’un Sarkozy, mais en nous racontant une histoire. Le procédé est plus insidieux, bien qu’il ne soit pas nouveau. Et surtout, il peut être répété. Jusqu’à saturation. Alors, hop, on en propose une autre. Du même acabit.

            Un autre créateur états-unien est actuellement en France pour la promotion de son livre. Il s’agit de James Ellroy. Un excellent écrivain, sans conteste. Mais lui aussi un homme de droite ultraréactionnaire. Il suffit de l’écouter parler. Une horreur !  Est-ce seulement un hasard s’il est aussi promu en France ? Je ne  le pense pas.

            Cela n’empêche pas de lire, n’y d’aller au ciné, mais avec de très bonnes lunettes pour décrypter les messages sous-jacents. Et y résister, au moins. Hélas, je suis certain que peu de spectateurs les portent, ces lunettes !

            Comme j’ai conscience que ce n’est pas ce petit articulet sur un blog qui suffira.
           Ce soir, je suis pessimiste.

 

 

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<br /> <br /> Les films Grain de Sable présentent LES TRAVAILLEU(R)SES DU SEXE et Fières de l'être, de Jean-Michel CARRE.<br /> Sortie en salles le 3 février.<br /> <br /> <br /> <br />
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